lundi 4 mars 2013

Déshabiller ces dames


Madame Deuxpieds est une des rares pensionnaires valides, je l’ai déjà dit. C’est le genre de femmes qui ont mené une vie dure, toujours à la tâche; elles ne savent pas rester inactives. Elle aide les autres, elle débarrasse à table, elle range les fauteuils qui traînent dans le couloir, elle va chercher des “secours” au besoin. En plus je crois qu’elle a bon cœur. Elle est aux petits soins pour sa voisine de chambre qui est totalement impotente d’esprit et de corps. Un fardeau.
Madame Deuxpieds m’apostrophe dans le couloir:
«Vous pourriez m’aider à lui enlever son pantalon?
— Ah non Madame Deuxpieds, je ne suis pas ici pour cela, ce n’est pas mon rôle.
— Alors c’est quoi votre rôle?
— Mon rôle c’est de rendre visite à ma mère et de vous saluer quand je vous croise dans le couloir.
— Ah bon.»
(Je dis ça gentiment, elle le prend avec le sourire.)
Je suis tout de même allé dans leur chambre pour essayer d’enlever la barre horizontale du lit, mais je n'ai pas réussi. Pas infirmier, je ne suis non plus ni bricoleur — ni malin.

(Deux dimanche plus tard: madame Deuxpieds exagère. Cette fois elle me demande de réparer sa télé. Ce que je fais bien volontiers. Mais cela ne dure pas deux minutes. Elle me congédie vite comme un employé incompétent: «Laissez, je demanderai aux infirmières.» Ah! Elle ne doute pas que je sois capable de mettre au lit sa voisine mais croit que les infirmières seront plus qualifiées que moi en matière de télé!)


1 commentaire:

  1. A te lire, on dirait que tu fais partie des gens qui disent toujours non et qui font quand même (à opposer à ceux qui disent oui et ne font pas).

    A ma grande surprise, j'ai remarqué que l'entourage était plus sensible aux mots qu'aux actes: il retient que tu as dit non, pas que tu as fait (ou que tu as dit oui, pas que tu n'as pas fait). C'est comme ça qu'en entreprise, les branquignoles grimpent dans la hiérarchie.

    RépondreSupprimer