Nous sommes partis dimanche vers 4 heures et demie
de l’après-midi. Dépose de la 4L au 142 chaussée Jules-César et
en route pour les vacances.
« On va en vacances » dit Macaronie.
Déjà des embouteillages à Saint-Denis et sur
l’autoroute du Nord vers Paris. Peu de monde en revanche sur
l’autoroute du Sud. Arrête premier en Bourgogne. Macaronie
désagréable, je lui crie dessus. Souvent maladroit mais je ne m’en
rends pas compte et si je me rendais compte je ne le serais pas. Je
ne sais pas trop comment m’y prendre. Elle pleure et se met en
colère si bien qu’elle en pisse sur son siège. Je prends le
volant au sommet de la côte d’Or, manque de m’endormir ; nous
nous arrêtons de nouveau un peu plus loin. Un bon café, un
chewing-gum (Hollywood menthe) de l’air dans la voiture me
réveillent et je reste en forme jusqu’à l’arrivée. Monotonie
de ce parcours, épique depuis Cortazar. On n’entrevoit à peine
Lyon. Les filles s’endorment après maints geignements un peu avant
que la nuit tombe. B remarque qu’en beaucoup d’endroits du
parcours on hume des odeurs désagréables qui n’étaient pas
avant. Feyzin bien sûr mais aussi d’autres points : égouts,
produits chimiques. Vers deux heures et demie moteur ralenti,
silencieux dans le silence de la nuit provençale nous glissons dans
Noves, dans Châteaurenard, dans Saint-Rémy sans voir la silhouette
des Antiques endormis.
A l’arrivée au Baux nos prédécesseurs n’ont
pas encore quitté la maison mais ils logent dans la petite
dépendance et ne nous gênent pas. On sort furtivement, en silence,
les enfants et les valises.
Lundi. Le matin de bonne heure – neuf heures
disons – Macaronie et moi allons à Maussane acheter des croissants
pour le petit déjeuner, et puis plus tard nous allons au supermarché
dans les faubourgs d’Arles – chaleur étouffante – et puis nous
allons déjeuner… où… où…? ah oui, place du Forum, vers deux
heures, trois heures de l’après-midi, et nous rentrons faire une
longue sieste. Nous dormons tous les quatre à cause des fatigues de
la veille. Le soir nous reprenons la voiture, retraversons Arles
embouteillée, pour rejoindre Salin-de-Giraud et la plage dite
d’Arles. Une plage de bout du monde, sable gris parsemé de
caravanes-taudis. Vent qui nous apporte des odeurs de merguez,
végétation chiche, mer morte au bleu mat, soleil de soir du monde.
À l’étang de Vaccarès, le crépuscule de fin du monde n’empêche
pas les filles de faire des pâtés. le soleil s’éteint vraiment.
Beaucoup de flamants, de petits lapins peu farouches qui se grattent
les oreilles à quelques mètres.
Hier matin lever tôt, neuf heures, et en route pour
les Saintes-Maries. Petit café le long de la digue. En voiture nous
longeons jusqu’à la pancarte « propriété privée »
cet absurde chemin de l’est coincé entre la vase des résidus
d’eau boueuse, la même mer morte du jour précédent et des marais
peut-être salants ou marécages. Nous passons quelques heures plus
près de la ville sur un recoin de plage presque agréable, le soleil
cuit fort, dissimulé derrière un vent qui rafraîchit. Pique-nique
sur la plage puis repos sous le premier arbre trouvé, à douze
kilomètres de là, au nord des Saintes-Maries. B lit Schnitzler.
Nous retournons aux Saintes. Je passe deux bonnes heures chez un
coiffeur muet comme un poisson qui se met à parler et plaisanter
quand l’un de ses copains arrive, un coiffeur qui fignole à la
petite brosse, au pschtt pschtt et au rasoir. B et les filles pendant
ce temps errent dans les rues piétonnes chargées de boutiques à
touristes. Nous entrons quelques instants dans l’église – style
pur. J’aime bien aussi tous les cierges dans la crypte. Nous en
mettons un dans chaque église, trois francs, c’est Macaronie qui
veut ça. Aujourd’hui à Saint-Agricol ou Notre-Dame des Doms elle
en a mis un (une bougie dit-elle) pour sa tante (ça ne peut pas lui
faire de mal). Après les Saintes-Maries ,Saint-Gilles, où nous
jetons un coup d’œil distrait sans sortir de voiture à cette
façade que, décidément, quatre ans plus tard, nous n’aimons
toujours pas. À Beaucaire et Tarascon nous cherchons désespérément
où dîner. Il reste la tour triangulaire, rien de la foire qu’un
parking sous les arbres, rien du souper puisque pas même une
gargote. À Tarascon des militaires cherchent un cinéma. Cependant
le pont sur le Rhône, le château et l’église illuminés par le
soleil du soir sont assez beaux. Nous dînons à la pizzéria x à
Saint-Rémy.
Aujourd’hui nous passons la journée en/à
Avignon. Départ par le val d’Enfer, passage de Maillane, de
Rognonas, visite de saint-Agricol ; assez intéressante mise en
valeur des ruines romaines découvertes à son chevet. Errances le
long des rues sans voiture, déjeuner d’une crêpe et d’une
salade à un angle de rue. La place du Palais est en effervescence,
ce soir ils accueillent Mireille Mathieu, aussi le musée Campana
ferme à cinq heures et le parc des Doms est déjà fermé. Hormis
une partie de la façade et, pour le principe, les fresques effacées
de Martini, on ne peut dire que je sois séduit par Notre-Dame des
Doms.
B en revanche commence à être séduite par les
primitifs italiens, leurs enfants Jésus difformes, leur Vierges aux
yeux de Chinoises et au front bas, leur ciels d’or, leurs anges qui
planent ou qui font des piqués, les roses, les verts, les bleus et
les montants de bois dorés. On cherche désespérément la Tarasque
de Noves qui a déserté la chapelle du lycée.
(À Beaucaire, non pas le souper mais le triangle et
la courbe. Ne pas oublier l’oratoire elliptique à l’ouest de
Saint-Agricol ; dans la chapelle du lycée une scène de halage
gallo-romain réjouit le cœur.)
Le vent qui souffle tout le jour rafraîchit l’air
dans les ruelles étroites sans soleil. Un verre sur le coup de sept
heures place de l’hôtel de ville. Peu de filles jolies sauf
peut-être les deux petites musiciennes qui jouent du Telemann.
Retour par les Antiques, magnifiques monuments,
splendides, exaltants. Qu’est-ce que j’y mets comme mythe
derrière : toute la gallo-romanité !
Ce matin, une demi-heure de course à pied autour de
la montagnette qui domine la maison avec des muscles noueux.
Macaronie a une mémoire de gros éléphant.
Bidibulle s’émancipe et marche de plus belle, pas toute seule, pas
encore.
Les filles, après une journée sans sieste, à dix
heures et demie n’ont toujours pas sommeil.
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