samedi 24 mai 2014

Mercredi 24 mai 2006



Dimanche. Encore la famille, le passé, les cimetières. A 14, A 15, forêt de L’Isle-Adam, Persan. Première halte-souvenir: Boran et sa piscine, ruine abandonnée depuis peu. Saint-Leu-d’Esserent. Je n’aime pas cette église, sauf par le souvenir de la photo de Marcel Proust devant le porche. Puis la route de ma grand-mère: Mello, Cires-lès-Mello. (J’ai lu ce matin que Rousseau avait envisagé de se retirer sur proposition du duc de Luxembourg à Mello.) Château, le cavalier au portail de l’église. Plusieurs modestes églises gothiques de villages le long du Thérain, que j’ai bien connues autrefois, presque oubliées aujourd’hui.
Le long du Thérain usines anciennes en ruine, région de vieille tradition ouvrière, aujourd’hui mêlée: paysans ou anciens paysans déclassés, prolétariat, français, arabe, noir, chômeurs, classes pauvres de la région parisienne qui viennent jusqu’ici pour pouvoir se loger à prix encore raisonnable. Ils achètent de très médiocres pavillons avec un bout de terrain, illusion de la campagne. Non pas que ce ne soit pas la campagne mais une campagne étriquée. Tout est étriqué dans ce petit pays. Il fut un des centres de la brillante France gothique, et bien avant du pouvoir carolingien, il ne ressemble plus qu’à une friche. Traversée de la forêt de Hez par des pistes de terre entre les fondrières. 
Étouy, arrivée par la gare, totalement disparue, effacée, par les ronces, le temps qui passe, ou plus sûrement pas la nouvelle route à quatre voies qui joint Clermont à Beauvais. Le long de la rivière, annoncée à Ronquerolles comme la Brèche, dans mon souvenir ma grand-mère disait la Nonette. Je reconnais la maison. 
Le cimetière, les tombes dévastées par le temps et le vandalisme. Le cimetière est en pleine réfection. L’on l’a vandalisé, mais aussi nombre de tombes sont oubliées, plus un vivant n’en prend soin, les descendants ne savent plus, ils sont en ville, loin d’Étouy. Étouy oubliée, perdue vers le nord, sous un ciel bas, d’une tristesse si profonde. Et l’on ne peut même pas dire un désespoir pathètique, romantique, non! une pauvre petite tristesse sans nom, médiocre. Endroit adéquat pour un cimetière, le cimetière d’un monde oublié, abandonné, qui se meurt, un monde fini. Les vandales n’ont plus qu’à finir le travail, ce que je dis plus haut ? Bah ! les pillards de sépulture, on a toujours connu cela, depuis des millénaires. 
La tombe Lejeune, à l’angle gauche en rentrant. La tombe Ardouin que je photographie avec tous ces noms et ces dates, mais réflexion faite je ne sais plus si ce nom, Ardouin, est dans l’arbre généalogique. La tombe de mes grands-parents, la tombe de mes arrière-grands-parents. Et soudain je pleure. Léon Lejeune 1870-1950 ; Victorine Lejeune, née Noirez 1877-1955 ; Armand Leneveu, 1898-1986 ; Madeleine Leneveu, née Lejeune, 1901-1989. 
Je cherche vainement la tombe de Suzanne, maman m’a rappelé son nom hier: Seghers.

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