jeudi 30 janvier 2014

Samedi 30 janvier 2010



« À la base se trouvait la peur. Il en avait souvent discuté, en état de veille, avec le docteur Pardon, qui avait, lui aussi, l’expérience des hommes et qui n’était pas loin de partager ses conclusions.
Tout le monde a peur. On s’ingénie à dissiper la peur des tout-petits avec des contes de fées, et presque aussitôt, dès l’école, l’enfant craint de montrer à ses parents un livret scolaire qui comporte de mauvaises notes.
La peur de l’eau. La peur du feu. La peur des animaux. La peur de l’obscurité.
Peur, à quinze ou à seize ans, de mal choisir son destin, de rater sa vie.
Dans sa demi-conscience, toutes ses peurs devenaient comme les notes d’une symphonie sourde et tragique : les peurs latentes qu’on traîne jusqu’au bout derrière soi, les peurs aiguës qui font crier, les peurs dont on se moque après coup, la peur de l’accident, de la maladie, de l’agent de police, la peur des gens, de ce qu’ils disent, de ce qu’ils pensent, des regards qu’ils posent sur vous au passage. » 
Simenon, La Patience de Maigret


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