«je les ouvris la lumière était toujours allumée
elle était couchée sur le dos une jambe légèrement ouverte l’autre repliée
haute comme une montagne au-dessus de moi le pied à plat sur le drap froissé et
en arrière un peu plus bas que la cheville la peau plus épaisse à cet endroit
faisait trois plis horizontaux au-dessus du talon légèrement teinté d’orangé,
ma joue sur la face interne de l’autre cuisse qui dans cette position devenait
la face supérieure que je pouvais voir à l’endroit où elle s’attachait au corps
sous les poils légers qui commençaient là le renflement formé par le tendon qui
traverse l’aine en diagonale, la peau très blanche en haut de la cuisse se
teintant d’un bistre clair à partir de l’aine, les lèvres de la fente d’un
bistre plus prononcé avant l’endroit où commence la muqueuse comme s’il restait
persistait là mal effacé quelque chose de nos ancêtres sauvages primitifs
sombres s’étreignant s’accouplant roulant nus violents et brefs dans la
poussière les fourrés: dans cette posture elle était à peine ouverte, on voyait
un peu de mauve pâle comme un ourlet une doublure dépassant légèrement, la
couleur bistre allant encore s’accentuant plus prononcée fauve à mesure que le
regard descendait vers les replis on aurait dit une étoffe une soie légèrement
teintée pincée du dedans par deux doigts le haut dessinant comme une boucle ou
plutôt une fronce une boutonnière de chair, elle dit»
Claude Simon, La Route des Flandres
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